Origines, la lignée Centuri by Pierre H Charron

Auteur:Pierre H Charron [Charron, Pierre H]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantastique
ISBN: 9782898032783
Éditeur: AdA
Publié: 2020-01-12T23:00:00+00:00

23

Le chapiteau avait été monté tôt dans la matinée. Comme à l’accoutumée, il prenait l’espace réservé aux poissonniers, qui partageaient une autre zone avec les maraîchers pour l’occasion. Les marchands faisaient des affaires d’or lorsque les caravanes descendaient dans la basse citée.

Dans la première rangée, du côté sud, Francis était assis, les mains sur les genoux, attendant la représentation avec impatience. Comme à chaque occasion, c’était son ami le ménestrel Vattio qui ouvrait le spectacle avec l’une de ses prestations. Aujourd’hui, il démontrerait son talent dans une exhibition intitulée : Solo pour un saule-litaire. Un numéro que Francis avait vu une dizaine de fois, mais dont il ne se lassait pas.

Déguisé en saule pleureur chantant, le bouffon-amuseur multiplierait les frasques et les acrobaties en roulant et en culbutant dans l’arène, tout en jouant de la vièle. Vattio était un clown hors du commun que Francis adorait. Le plaisantin appréciait tout autant le jeune garçon.

Les estrades commençaient déjà à se remplir. En face de lui, Francis avait remarqué Fisk et sa bande de voyous, qui raillaient en pointant dans sa direction. Ils devaient encore se moquer de son accoutrement.

Francis était habillé d’un costume trois-pièces. Un veston sans manches recouvrait sa chemise d’un blanc immaculé, dont le bas était rentré dans son pantalon lisse et sans faux plis. Ses souliers noirs tout frais cirés complétaient sa tenue soignée. Monsieur Ed était pointilleux sur les conventions de la monarchie, en particulier lorsqu’il était question du code vestimentaire.

Le vieil ermite était assis juste au-dessus, dans une section plus haute, et observait le manège qui se déroulait devant. Il regarda vers Francis pour constater que son protégé demeurait calme. Il approuva son attitude en silence.

Dans les coins du chapiteau, des projecteurs s’allumèrent et éclairèrent la scène en contrebas. L’excitation de Francis monta d’un cran. Et il jubila littéralement en apercevant celui qui venait de lui agripper l’épaule en arrivant par-derrière.

Vattio le ménestrel, son instrument à la main, lui exprima un sourire chaleureux.

— Tiens, si ce n’est pas mon ami Francis. Toujours au rendez-vous à ce que je vois ?

L’homme était habillé d’un costume confectionné de cinq cylindres en osier gris charbon, souples et recouverts de stries. L’un l’enveloppait du cou jusqu’à la taille, et les quatre autres encerclaient ses bras et ses jambes. Seuls ses pieds, chaussés de souliers aux pointes retroussées, et ses mains gantées, ressortaient à l’air libre. Sa figure maquillée de couleurs sombres renvoyait un visage à la fois triste et glauque. De toute évidence, Vattio, le saule-litaire, portait à merveille son costume d’arbre chantant.

— Je ne manquerais ton spectacle pour rien au monde, Vattio, s’exclama Francis avec enthousiasme.

Il attrapa le tronc d’osier et fit une accolade bien sentie à son vis-à-vis.

— Merci, c’est gentil, vieille branche, dit Vattio en lui assénant un coup de coude dans les côtes avant de lui adresser un clin d’œil taquin.

Francis s’esclaffa d’un rire communicateur. Vattio frappa sa tête avec ses grosses paluches. Cette fois, ce fut les enfants autour qui gloussèrent en l’observant.

— Bon, on se revoit à la fin du spectacle, si tu veux.

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